mardi 8 février 2011

Monsieur Leonetti: Quelle est votre position?

Lettre envoyee ce-jour a Monsieur Jean Leonetti.

Le 7 février 2011.

Monsieur le Député,

Les travaux préparatoires à la révision des lois de bioéthique ont commencé il y a deux ans. Ils ont donné lieu à de nombreux débats citoyens, rapports publics, auditions de personnes qualifiées par la mission parlementaire. Le projet de loi adopté en conseil des ministres le 20 octobre 2010 a tenu compte de tout ce travail préliminaire.

Vous avez vous-même, en tant que président du comité de pilotage des Etats Généraux de la bioéthique et rapporteur de la Mission parlementaire, estimé que ce serait une erreur politique et une faute morale de ne pas entendre ce qui s’était dit.

A l’approche de la discussion du projet de loi au Parlement, vous semblez avoir changé d’avis et vouloir vous démarquer de vos positions antérieures. Connaissant l’influence que vous avez sur les parlementaires de votre groupe, nous nous inquiétons beaucoup de cette volte-face.

D’après les échos que nous en avons, il semble également que la commission spéciale créée pour examiner le projet de loi avant sa soumission au Parlement veuille, sous la pression de chercheurs sans doute soutenus par des laboratoires en quête de brevets, balayer toute la réflexion collective et pluraliste de ces deux années, refusant toute limite à leur recherche sur l’embryon.

Nous sommes de simples citoyens. Comprenant l’importance de la consultation citoyenne sur ces lois, qui engagent l’avenir de l’humanité, nous avons participé à toute la réflexion de ces deux dernières années, commençant par nous former, puis organisant nous-mêmes des soirées d’information pendant tout le temps des Etats Généraux.

Quels que soient les progrès thérapeutiques que l’on puisse obtenir par la recherche sur l’embryon, nous pensons qu’aucun progrès scientifique ne justifie le sacrifice d’êtres humains, si petits soient-ils, et qu’il est essentiel de maintenir le principe d’interdiction de cette recherche et de renforcer et soutenir les recherches alternatives sur les cellules souches adultes et les cellules du sang du cordon ombilical.

Il est d’ailleurs surprenant de constater que certains scientifiques dénoncent et condamnent avec justesse les abus commis dans le passé au nom de la connaissance scientifique : essais faits sur des condamnés à mort, des débiles mentaux, des immigrés, des vieillards, et, dans le même temps, justifient le sacrifice des êtres les plus vulnérables, incapables de se défendre, les embryons orphelins, parce que sans projet parental, comme si l’absence de ce projet faisait disparaître la nature d’être humain

Le sort de tous ces embryons dits surnuméraires, congelés en attendant que l’on décide de leur existence, nous paraît de plus en plus inhumain. Les scientifiques n’ont-ils pas ouvert de nouveaux camps de concentration, où toutes les expériences sont permises sur ceux qui y sont détenus ?

Nous nous inquiétons enfin de constater que la médecine, plutôt que de rechercher les causes de l’infertilité d’un couple, ne semble préoccupée que par l’amélioration de la pratique de la procréation en dehors du processus naturel. Les chercheurs sont-ils à ce point fascinés par le nouveau pouvoir qu’ils détiennent sur les êtres humains qu’ils ne cherchent plus à les soigner, mais seulement à les fabriquer ?

Or nous constatons, à travers le compte-rendu des débats de la commission spéciale du 26 janvier sur l’assistance médicale à la procréation, que vous êtes un ardent défenseur du don de gamètes. Afin de favoriser le don d’ovocytes et un don de femmes jeunes, vous proposez que l’on supprime l’obligation pour les femmes d’avoir déjà eu des enfants. Sachant les risques inhérents à la stimulation ovarienne, notamment le risque d’infertilité ultérieure, vous proposez que ces femmes nullipares puissent obtenir la vitrification de leurs ovocytes restants afin d’assurer la possibilité d’une fécondation in vitro dans l’avenir. Ainsi, pour venir en aide à des couples stériles, vous proposez que des femmes risquent de compromettre leur fertilité naturelle future en les rassurant par la perspective d’une fécondation in vitro, qui est un parcours douloureux et éprouvant.

Nous sommes également profondément attristés par votre proposition concernant l’accès à l’AMP. Nous regrettions déjà que le projet de loi du gouvernement aligne les couples pacsés sur les couples mariés. Nous pensons au contraire, devant la fragilité des couples, que le mariage a besoin d’être valorisé, soutenu par l’Etat, car nous devons encourager l’engagement des couples et les aider à durer. Toute la société en tirerait bénéfice.

Vous allez encore plus loin que le projet de loi : « L’AMP ayant pour objet de remédier à une infertilité médicalement constatée, le statut social du couple importe peu. Les références au mariage, au PACS ou au concubinage n’ont pas lieu d’être. Je vous proposerai donc de les supprimer. Par ailleurs, il n’appartient pas au législateur de fixer une durée de vie commune attestant de la stabilité du couple. »

Par les deux mesures que vous défendez, vous entérinez le droit à l’enfant, à n’importe quel prix.

N’assistons-nous pas à une dérive profonde de la médecine ?

Nous espérons que toutes nos inquiétudes sont excessives et que vous allez pouvoir nous rassurer sur votre position.


Lucie Nodet

Presidente AFC d’Antibes

Thibault de Castelbajac

President AFC de Vence et ses environs


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