vendredi 15 mai 2009

Les sages-femmes seront peut-être autorisées à pratiquer des avortements (Marianne GOMEZ - La Croix)

Un amendement sénatorial discuté dans le cadre de la loi sur l’hôpital veut élargir les actes praticables par les professionnels de la naissance

Les députés y avaient renoncé. Les sénateurs ont repris le dossier. Dans le cadre du projet de loi sur l’hôpital, actuellement en discussion au Palais-Bourbon, la commission des affaires sociales a adopté un amendement autorisant les sages-femmes à pratiquer des interruptions volontaires de grossesse par voie médicamenteuse.

La députée Bérengère Poletti (UMP, Ardennes) avait déjà fait la même proposition, reprenant une recommandation de la délégation aux droits des femmes. Elle l’a retirée avant le débat dans l’hémicycle, « non pas à cause des pressions exercées par certaines associations, précise-t-elle, mais parce que la profession n’était pas prête ». Auteur du rapport de suivi de la loi sur l’IVG (octobre 2008), la députée justifie le recours aux sages-femmes par le fait que l’accès à l’IVG médicamenteuse en ville reste très inégal.

« Le premier frein tient au trop faible nombre de médecins ayant passé une convention avec un établissement de santé, condition indispensable pour pouvoir effectuer ces IVG. Quatorze régions ont ainsi moins de cinq médecins ayant passé cette convention (…). D’autre part, 90 % de ces actes sont réalisés par des gynécologues, or ceux-ci ne sont pas présents ou ne sont pas facilement accessibles », peut-on lire dans son rapport. D’où l’idée de faire appel aux sages-femmes, « qui ont la compétence technique nécessaire », estime-t-elle, à la fois pour prescrire la pilule abortive et contrôler les suites de l’acte.

L’Alliance pour les droits de la vie proteste

Celles-ci sont d’accord. « Une sage-femme doit être auprès de la femme, quelle que soit l’issue de sa grossesse, heureuse ou malheureuse », estime la présidente de l’Ordre national de sages-femmes, Marie-Josée Keller. Le Sénat a donc repris l’amendement. Celui-ci a été voté en commission, avec l’appui de la ministre de la santé, Roselyne Bachelot. Il propose « d’expérimenter » le recours aux sages-femmes « dans une région française connaissant un taux important de recours à l’interruption volontaire de grossesse ».

Muguette Dini (Union centriste, Rhône) en est à l’origine. « Le sujet est sensible, nous ne souhaitons pas l’imposer à toute la France, d’où l’expérimentation. Nous voulons aussi vérifier la validité de l’idée », explique-t-elle.

Dans un communiqué, l’Alliance pour les droits de la vie proteste. « Les pouvoirs publics déplorent le fort taux d’IVG en France : comment justifier qu’au lieu de s’interroger sur les causes de ce phénomène, on veuille augmenter le nombre de prescripteurs de cet acte qui n’a rien d’anodin ? » fait valoir l’association. Muguette Dini dit « comprendre » cette logique, mais ne la partage pas. « On n’a jamais informé suffisamment sur la contraception, et je le regrette. Mais une fois cela constaté, reste que certaines femmes sont déterminées à ne pas vouloir garder leur enfant, et que si l’on ne fait pas les choses correctement, on risque des accidents. » L’amendement, inscrit à l’article 22, ne devrait pas venir en discussion avant la semaine prochaine.

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